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Il est des situations pires que celle de perdre un enfant des suites d’un cancer fulgurant.
Celle de s’entendre dire un an après par le médecin conseil de la CPAM et qu’on n’a aucune raison d’être à mi-temps thérapeutique, au motif qu’on va très bien et qu’on a les soirs et les week-ends pour pleurer.
C’est ce que Sandra a vécu le jour de son anniversaire déjà si difficile à vivre sans son petit garçon de 7 ans.
Son témoignage nous a bouleversés autant que choqués.
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Mais ce témoignage n’est hélas pas isolé et de nombreux parents rapportent actuellement la violence des propos que certains médecins conseils leur ont tenus et combien ces propos destinés à les remettre au travail ont aggravé leur état plus qu’ils ne les ont aidés.
Si ce témoignage en encourage d’autres, et peut permettre de sensibiliser les institutions, merci de les partager sur le mail : contact@lepointrose.org 🙏🏻
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Après le décès brutal de son fils, six jours après le diagnostic d’une tumeur cérébrale incurable, Sandra a arrêté de travailler pendant neuf semaines.
Elle a repris le travail pour ne pas devenir folle enfermée chez elle, lorsque sa petite fille de 5 ans était à l’école.
Mais elle n’a pu reprendre qu’à mi-temps thérapeutique car ses capacités de concentration lui faisaient défaut, et le chagrin la submergeait encore trop souvent.
Commençant par quatre matinées, puis deux jours entiers et une matinée, et récemment trois jours entiers, elle a suivi une progression courageuse, motivée par l’envie de retrouver un jour les pleines responsabilités de son poste d’ingénieur.
Son travail lui plait, ses collègues sont compréhensifs et ses employeurs étaient d’accord pour que cet aménagement du temps de travail l’aide à reprendre pieds en gardant du temps pour elle, pour souffler et pleurer.
Ce mi-temps thérapeutique lui a permis de reprendre le travail moins de trois mois après le décès de son fils, ce qui est déjà presque héroïque et de continuer à travailler sans régresser, malgré la difficulté du premier anniversaire de sa mort.
A la rentrée de septembre, Sandra éprouvait le besoin de prolonger cet aménagement thérapeutique de son temps de travail et en avait fait la demande à son médecin traitant.
Sandra a alors été convoquée à la CPAM et elle espérait trouver une solution de prolongation de son mi-temps thérapeutique d’un mois ou deux ou un autre dispositif pour qu’elle puisse continuer à progresser sur son temps travaillé.
Elle nous raconte son entretien…
« Je suis sortie détruite de l’entretien. J’étais en pleurs, dans les locaux de la CPAM comme à l’extérieur. J’ai eu l’impression d’avoir été envoyée à l’abattoir et d’y avoir été anéantie. Le jugement était déjà arrêté avant même que je m’exprime, et l’entretien ne servait à rien d’autre qu’à me faire culpabiliser, et à me dire que j’allais trop bien, à 1 an du décès de mon fils, que j’avais déjà eu une aide alors qu’il ne fallait pas exagérer. »
Sandra poursuit : « J’étais jugée d’avance car je ne rentrais pas dans la case « je vais mal ». Je ne prends pas de traitement médicamenteux (je n’ai jamais voulu des antidépresseurs et j’ai supporté sans, même si la vie était insupportable à vivre par moments, c’est d’ailleurs pour ça peut-être que j’ai voulu travailler). Et je suis suivie par un psychologue et non un psychiatre. Puis comme je réussis à travailler à 50%, sans régression, voilà « je vais bien, « mieux que beaucoup de monde! », selon lui. Et je me suis entendue dire que si j’avais envie de travailler moins, je n’avais qu’à négocier avec mon employeur ».
« Je ne supporte pas que l’on me voit comme une maman qui exploite la mort de son fils pour ne pas travailler. C’est insupportable ! J’étais dans un puits sans fond l’année dernière, je croyais en sortir et commencer à marcher mieux, même si je boitais encore, je progressais, et là quelqu’un s’est permis de me casser les jambes et me faire tomber, je me sens encore à terre pendant que lui a pris la fuite. Il va falloir à nouveau que je me relève de ce nouveau coup dur. C’est inhumain et irresponsable d’un organisme public de santé en plus ».
« Depuis plusieurs semaines j’étais déjà très inquiète, je ne dormais plus bien à cause de cette incertitude sur mon avenir. Il a fallu réaménager mon travail pour y arriver mais depuis ce rendez-vous, je suis anéantie, j’au dû arrêter le travail au complet, je me sens démunie, à nouveau dans un puits, et me repasse en boucle les propos de ce médecin : « Le dispositif c’est 1 an, 1 an, 1 an, et encore 1 an… ». J’ai l’impression que tous mes efforts depuis un an pour reprendre peu à peu, ont été ruinés et qu’il me faut recommencer à zéro. Depuis mardi, je ne parviens plus à me concentrer comme avant et je suis épuisée par mes mauvaises nuits comme mes mauvais jours. Au lieu de m’aider à reprendre, j’ai l’impression d’être retombée plus bas, je suis arrivée à mes limites, chose qui ne m’étais pas arrivée depuis ma reprise du travail. Le comble ! »
« Je continue à penser que c’est ma santé actuelle qui m’empêche de reprendre un poste à 100%. Je suis la 1ère à vouloir récupérer ma vie et mon travail à temps plein. Je ne comprends pas pourquoi je n’ai pas droit à continuer à être soignée, protégée de la malveillance qui n’aide pas. Etre aidée pour retrouver mon contrat initial, je ne crois pas que la loi l’interdise. Je garde néanmoins l’image des personnes qui se sont arrêtées à la sortie de la CPAM pour me consoler et m’ont extrêmement touchée dans ce moment si dur ».
Et Sandra de conclure : « Mon médecin traitant et mon psychologue se sont dits choqués. Mon entreprise aussi m’a proposée de passer par le don de jours pour essayer de trouver une solution, consciente de mes difficultés. Entretemps, je cherche un psychiatre pour me faire suivre dorénavant pour être enfin crédible aux yeux de la CPAM dans mes difficultés, sans être plus perçue comme une « profiteuse ». Je n’imaginais jamais être à ce point ébranlée dans mon deuil après la mort de mon jeune garçon de 7 ans ».
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Les propos choquants du médecin conseil que Sandra s’est entendue dire sans ménagement :
– La loi donne 10 jours de congés pour le décès d’un enfant, il y en a qui font avec
– Vous n’êtes pas suivie par un psychiatre alors ça veut dire que vous allez bien (Sandra a été suivie pendant 6 mois par le psychiatre de l’hôpital de Purpan, qui n’a pu poursuivre ce suivi individuel externe et devait lui conseiller quelqu’un).
– Vous ne prenez pas de traitement, d’autres arrivent avec un dossier grand comme ça !
– Si vous étiez vraiment mal, vous auriez forcément eu un suivi psychiatrique et un traitement
– Vous n’avez qu’une seule ordonnance avec un traitement fort en février car le dernier en septembre ne compte pas, vous l’avez fait exprès car vous saviez que vous alliez être convoquée… (Sandra a reçu sa convocation 3 jours avant…)
– Vous travaillez à 60% maintenant, vous pouvez donc travailler à 100%
– Si c’est juste pour pleurer, vous pouvez le faire les soirs et les weekends. Et vous vous reposez les weekends comme tout le monde.
– De toute façon, votre deuil sera toujours là, et ça ne changera rien.
– Vous croyez avoir plus de droits que les autres personnes ? Des parents comme vous, on en a tous les jours.
– Votre conjoint a repris, alors pourquoi pas vous?
– Les attestations que vous avez c’est juste d’un psychologue, ce n’est pas un médecin, lui il ne fait que remplir des grilles (je ne sais pas ce qu’il a voulu dire avec ça).
– Si vous n’avez qu’un suivi psychologique tous les 15 jours alors vous avez suffisamment de temps pour travailler. Le gens qui vont mal ont plein de rendez-vous médicaux (Sandra a eu pourtant tellement de rendez-vous médicaux depuis un an pour des conséquences cardio, gastro, gynéco, osthéo, psy… de son deuil).
– Vous avez déjà eu un an de mi-temps thérapeutique, vous avez eu suffisamment de temps.
– Vous me parlez de capacité de mémoire, de concentration, etc, si vous travaillez 60% vous pouvez faire 100%. Ou négociez avec votre employeur un contrat à 60% et du télétravail
– C’est ceux qui vont plus mal (se référençant aux personnes ayant une maladie grave) qui sont les plus courageux et ne demandent rien.
– Si la loi ne vous convient pas et que vous voulez en changer, allez voir les députés.
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Vous avez été très nombreux à réagir sur les réseaux, nous transposons ici certains de vos témoignages, preuves que le cas de Sandra n’est pas unique.
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Marie B
« Il m’est arrivé une chose assez similaire.
Quand Liam a été diagnostiqué, je me suis mis en arrêt de travail parce que mon état psychologique ne me permettait pas de travailler. Et puis Liam avait besoin de moi tous les jours.
J’ai été contrôlé, le docteur de la sécurité sociale qui m’a reçu m’a dit  » vous n’avez rien à faire en arrêt, ce n’est pas vous qui êtes malades »… »
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Magali B
« … J’ai été reçue par un psy expert horrible, aucune empathie, un technocrate qui voulait remplir son papier et m’a demandée d’arrêter de pleurer car il n’arrivait pas à se concentrer… j’ai connu l’horreur, une personne qui m’a dit vous êtes une fonctionnaire comme tout le monde : je suis infirmière comment s’occuper d’autrui quand on est anéantie ? Je n’ai pas eu la force de me battre pour dénoncer ce soit disant expert psy inhumain au conseil de l’ordre… « 
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Na I
« Une semaine après la mort de ma fille de 13 ans, la CAF m’a demandé le remboursement de la prime de rentrée scolaire de août 2019 car Adèle est décédée en avril 2020. Comme cette maman, ce fut un vrai coup de poignard… »
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Jennifer V
« … La CAF m’a demandé le remboursement des prestations familiales de base par ce qu’ils ont mis 3 mois à prendre en compte que ma fille était décédée, soit 300 euros… »
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Corinne B
« … Mon employeur a refusé ma reprise à mi-temps thérapeutique un mois après le décès de mon fils. J’ai dû rester en arrêt. A l’heure actuelle je suis en congé de longue durée et j’entends dire de mon employeur que je lui reviens trop cher donc il essaye de trouver un moyen de me renvoyer… »
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Estelle A
« Pour nous aussi, les relations avec la CPAM ont été compliquées… Arnaud avait été convoqué à la Sécu un mois après le décès de Léa car il avait atteint ses 6 mois d’arrêt maladie. Il venait également de reprendre son travail à temps partiel thérapeutique depuis 3 semaines, soit un mois après le décès de Léa. Nous pensions que ça serait une simple formalité…
Le jour du rdv, le médecin conseil n’étant pas au courant du décès, Arnaud l’en informe et lui montre l’avis de décès.
Les démarches administratives avaient été faites rapidement et Léa avait vite été supprimée…
Ce médecin sans aucune empathie ni le moindre mot réconfortant envers Arnaud ose lui dire : « Comme vous n’êtes pas suivi par un psychiatre mais par un psychologue et que vous n’avez pas de traitement médical contre la dépression, j’estime que vous êtes apte à reprendre le travail à temps plein et donc vous n’aurez plus d’indemnités. »
« Vous verrez, avec le traitement, dans 6 mois vous irez mieux ».
Arnaud faisait une heure de route pour aller travailler !!! Il en était incapable d’y aller tous les jours !
Un scandale !!!!! Comment un médecin peut-il dire cela à un parent qui vient de perdre son enfant ????
Il n’a même pas souligné le courage d’Arnaud de reprendre le travail aussi vite…
Comment penser que l’on doit tous obligatoirement passer par des médicaments et un psychiatre ??? Alors que nous étions suivi par un psychologue depuis des mois et notre médecin généraliste.
Donc nous avons vu un psychiatre, en plus du reste, qui nous a fait les arrêts maladie. Sans compter les médicaments que nous achetions mais que nous n’avons jamais pris…
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De mon côté ayant repris le travail plus tard je n’ai eu aucun problème avec la Sécu car j’avais anticipé les rdv psychiatre pour les arrêts maladie de mon temps partiel thérapeutique…
Par contre, contrairement à Arnaud, c’est avec la Médecine du travail que ça ne s’est pas très bien passé.
Je n’avais pas encore repris le travail qu’il me demandait combien de temps je pensais être en temps partiel thérapeutique ! En colère je lui avais répondu : « Je ne me suis pas cassée la jambe, j’ai perdu ma fille je vous le rappelle, je prendrai le temps qu’il me faut ».
A chaque rdv avec lui je sentais cette « pression » de vouloir me faire reprendre à temps plein alors que de ma DRH je n’avais pas le même discours.
Plusieurs mois plus tard il m’a culpabilisée sur le fait qu’à temps partiel c’était mes collègues de bureau qui avaient la charge de mon travail quand j’étais absente, me faisant porter ce poids. Et que ça devait sûrement embêter mon chef aussi. Alors tout a été fait en concertation avec eux. Impensable !
Ou encore cette phrase après m’avoir examinée : « Vous avez une bonne tension, je trouve que vous vous exprimez mieux que la dernière fois où l’on s’est vu, vous n’avez pas perdu de poids, je vous sens apte à reprendre ».
Mais que savait-il ce que je vivais au fond de moi ?
Sous prétexte que je ne m’effondrais pas, et que mes paramètres médicaux étaient bons et qu’en apparence je paraissais bien, hop au travail ?
Ou encore cette autre phrase : » Vous n’avez droit qu’à un an de temps partiel thérapeutique, vous serez bientôt contrôlé, vous risquez d’avoir des problèmes avec eux mais faites comme vous voulez vous verrez bien !!! »
Et bien non…
Je lui ai dit : »Monsieur, je m’occupe et soutient aussi ma fille de 12 ans qui est aussi suivie. Elle me parle de vouloir rejoindre sa sœur et de fuguer donc je dois veiller sur elle et être présente, à l’écoute et vigilante. Et tout ce que vous ne savez pas…ma priorité est ma famille.
Est-ce que vous savez que c’est devenu compliqué de se concentrer sur une tâche professionnelle ?
Donc j’ai droit à un an de temps partiel thérapeutique, je le prendrai et si j’avais droit à 5 ans je les aurais aussi pris. Je ne vole rien à personne. Je ne suis pas en arrêt depuis 20 ans !!! »
Incompréhensible venant de médecins… »
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